Censure, liberté d’expression et crédulité médiatique
J’allais tranquillement aller savourer mon plat de poissons fraichement péchés sur le port (dédicace Devnosite), lorsque j’ai vu que certains accusaient les libraires refusant de vendre le livre de Valérie Trierweiler de “censure”. Les mots ont un sens, surtout pour ceux qui subissent la véritable censure, alors faisons le point sur ce qu’est réellement la liberté d’expression !
La liberté d’expression c’est “j’ai le droit de dire ce que je veux”
C’est énorme, mais ça ne veut pas dire “j’ai le droit de vous obliger à m’écouter“, ni “j’ai le droit de vous obliger à le dire avec moi” ou “j’ai le droit de vous obliger à me servir de porte-voix“.
Autrement dit, il n’y a pas de “service public pour émettre ses opinions”.
Le membre du forum qui se fait modérer ne se fait pas censurer
… comme il a tendance à le dire souvent, en sortant des comparaisons qui lui valent, en plus de l’animosité du modérateur, un joli Point Godwin.
Un forum est un lieu privé ouvert au public, soumis aux règles émises par le propriétaire du forum.
(Comme les commentaires d’un blog).
Si la personne veut réellement exprimer son opinion, elle peut parfaitement le faire ailleurs, chez elle, sur son propre blog, le référencer, inonder internet avec son opinion. (Dans les limites de la loi).
Être censuré, c’est se retrouver en prison, éventuellement torturé, perdre ses biens, sa liberté, de l’argent, un travail, pour avoir exprimé ses opinions.
Un libraire n’est pas un distributeur automatique
Un libraire est un marchand, jusqu’à maintenant responsable du choix des produits qu’il propose à sa clientèle.
Les règles de l’office font qu’un libraire reçoit automatiquement un certain nombre de chaque nouveauté, en fonction de sa taille et des prévisions de vente. Il a le droit de les renvoyer s’il ne les vend pas, mais ça prend longtemps (je ne sais plus, à l’époque où je travaillais dans le métier, en gros, il y avait plusieurs mois de trésorerie à faire entre le moment où il était facturé et le moment où il recevait le remboursement des invendus).
Il a donc tout intérêt – mais aucune obligation – à présenter les livres qui lui sont envoyés. Quoique, dans ce cas particulier, il serait difficile de réellement prétendre ne pas pouvoir vendre cette chose.
Une fois vendues les quantités envoyées d’office, le libraire n’a aucune obligation de proposer un livre qu’il n’aime pas.
Au contraire…
La lutte des petits libraires contre les grosses chaînes passe obligatoirement par cette sélection, ce conseil, cette recherche de livres qu’on ne trouve ni dans les supermarchés, ni sur Amazon, ni dans des chaînes de libraires qui fonctionnent désormais comme des épiciers.
Je suis en accord total avec un des libraires qui explique pourquoi il refuse de vendre cette chose, je trouve juste dommage qu’il trouve nécessaire d’évoquer la censure… D’autant plus que ce produit peut être trouvé “partout”.
Si vous allez lire la discussion, vous verrez qu’un certain +Gerardphilippe lui, aurait vendu le livre. “Business is business”.
De la responsabilité individuelle du marchand / du blogueur
C’est un sujet que je vais développer, mais les problématiques sont finalement les mêmes. En face d’un livre “torchon” mais qui se vend comme des petits pains, en face d’une affiliation douteuse mais qui rapporte beaucoup, faut-il vendre ou rester sur le côté ?
Le blogueur peut-il être un épicier qui refile du lien pour de l’argent, sans se sentir en quoi que ce soit responsable de la qualité réelle de produits qu’il n’a pas testés, faire des articles invités dans le cadre d’une prestation d’e-réputation sans se renseigner sur la personne qu’il cautionne ipso-facto, ou, au contraire, considérer qu’en tant que personne, même si les liens sont nofollow, il participe à quelque chose avec lequel il est, en réalité, en désaccord ?
L’internet est une démocratie directe dont les liens sont les votes. De temps en temps, c’est bien de s’en souvenir.
(Après chacun fixe les limites comme il l’entend en fonction de son éthique personnelle, hein ^^ la question est juste, à mon avis, d’en avoir une).
De la crédulité médiatique et de l’écho
Ça c’est la cerise sur le gâteau, car je ne vais pas faire un article juste sur le sujet. J’ai téléchargé le texte de Valérie Trierweiler (jamais je ne donnerai un centime pour ça, même si en principe je suis contre tout piratage d’oeuvre intellectuelle, là mon échelle de valeur a d’autres priorités), et ce qui me surprend, c’est de voir à quel point les gens prennent pour argent comptant ce qu’elle écrit.
Qu’une Lady Di au petit pied, totalement égocentrique et qui vient de prouver qu’elle n’avait effectivement rien à faire à la place où elle se trouvait promette de dire “toute la vérité, rien que la vérité” et personne ne semble se poser la question de la réalité de ses dires, des mauvaises blagues qu’elle impute à François Hollande, de l’éventuelle sortie de contexte de certaines phrases…
De la même façon, sans vendre un produit, on est aussi responsable de ce qu’on partage, sans en vérifier la véracité.
(Fin de la minute de morale, le patron du restaurant trouve que mon portable tient vraiment de la place sur la table, et les calamar sortis du four sont vraiment trop bons… et les playmobils qui illustrent cet article sont une image sous licence CC BY NC SA d’Alex Eylar)
Miam des calamars.
Voilà un truc auquel je n’avais jamais pensé: obliger les libraires à vendre mes albums s’ils ne veulent pas que je les poursuive pour “censure” ! Si tous les auteurs faisaient ça (enfin, si c’était possible), les librairies ressembleraient à un vaste chantier infranchissable…
Le seul truc positif que je vois à ce succès de librairie, c’est que les médias risquent d’être moins enthousiastes pour parler de la prochaine “rentrée littéraire”.
Sauce charmoula, en plus, c’était vraiment super bon
http://www.750g.com/chermoula-%28marinade-pour-poisson-et-autres%29-r79379.htm
(tente le coup, pour la censure, ça va peut-être marcher !)
Chère deux-pattes Marie-Aude,
Outre le fait que votre billet d’humeur soit en adéquation avec ma propre opinion quant au sujet évoqué, j’apprécie l’humour délicat qui est le vôtre.
Vous touchez là du doigt (ô chanceuse qui bénéficiez du don de préhension , vous ne pouvez imaginer combien le chat (siamois de surcroît) que je suis aimerais posséder ce prolongement du corps) l’une des dérives des médias traditionnels, des éditeurs, des libraires, et la responsabilité qui est celle des émergents, en l’occurrence ceux qui fleurissent sur la toile internet.
Une éthique est, en effet, nécessaire aujourd’hui.
Une autre réflexion m’est venu : Pourquoi les auteurs deux-pattes tels que Li-An, de par leurs connaissances en terme de blogging, ne créent-ils pas leur propre réseau de lecteurs… et pourquoi ne vendent-ils pas directement de l’auteur au lecteur ?
Pour ma part, je préconise le lien direct du personnage au lecteur…
Très belle journée à qui pose les yeux sur ces mots !
Eschylle
Cher poilu
(vous ne m’en voudrez pas, j’espère ? Ma Pompon, qui me miaule que j’ai des connaissances fort sympathiques via ce blog, et qu’elle aimerait bien faire une rencontre MaineCoon – Siamois est “ma poilue d’amour”)
En ce qui concerne Li-An, je ne sais pas. J’ai des amis qui ont fait cela. L’exercice n’est pas toujours simple. Certains trouvent plus facile de se “laisser vendre” par un éditeur que de se vendre eux-mêmes. Cela se fait de plus en plus, mais cela n’est pas sans risque (piratage, etc)
Rassurez-vous : vos pattes sont des prolongements très efficaces de votre volonté. D’ailleurs celle de ma Pompon se pose de plus en plus lourdement sur mon poignet, il est temps d’aller s’occuper d’elle !
Superbe article. Merci pour la dédicace. C’est juste Devnosite par contre (pourquoi? je sais pas, je ne suis pas développeur, ça c’est un truc certain lol).
C’est très symptomatique de l’époque. Il existe des tas de librairies politisées, voire religieuses. Demandera t-elle à ce qu’elle fasse parti du catalogue d’une librairie chrétienne ou musulmane? Après tout, elle nous donne à lire le récit d’une vie hors-mariage ratée. Ca peut être un cas intéressant à étudier pour tous les religieux. ^^
Plus globalement, ça me hérisse le poil lorsque des rebelocrates à talon haut (Louboutin?) parlent de censure. Cas typique des féministes et autres communautaristes de l’époque. Ca nous fait oublier que des gens dans ce monde se battent juste pour pouvoir dire ce qu’ils pensent (pas pour avoir une tribune, mais bien de pouvoir s’exprimer librement). Quand on invoque la censure lorsqu’il n’y en a pas, c’est souvent pour pouvoir exprimer au grand jour une certaine forme de perversité. Cette femme déverse juste son fiel sur un compagnon infidèle. Quelque part, il n’était pas lié à elle (pas marié). Elle n’est même pas légitime pour exprimer un quelconque ressentiment. Donc quelque part encore, on en a rien à foutre et je n’ai pas envie que mon libraire me pourrisse le champs de vision avec l’histoire de cette dame. Sur les forums, on retrouve les mêmes zozos comme tu l’expliques. Des gens très remontés et insultants qui crient à la censure au travers de multi-comptes, souvent histoire de faire monter la sauce parmi les forumeurs. Personnellement, j’utilise la modération de manière extrêmement dure. Je peux juger qu’un seul mot va à l’encontre de MES valeurs et supprimer le commentaire, bannir l’IP, bannir une plage d’IP suédoise si ça me chante ;). C’est mon droit et même mon devoir moral d’éditeur de site web.
Je vais lui donner un conseil de blogueur pro’ (ouais, je suis un blogueur pro’, je l’ai décidé ce matin). En 3 clics, elle peut installer un WordPress. Un autre blogueur pro’ avait dit: “il y a un consensus pour dire que WordPress est le meilleur logiciel de création de site, ça se référence quasiment tout seul”. Qu’à cela ne tienne. Avec cet outil, elle va pouvoir publier son ebook, récupérer des mails et monétiser son audience. Devenir riche très vite via un lancement orchestré (avec ou sans musique?). Même pas besoin de toucher un avaloir de la part d’un quelconque éditeur, elle va pouvoir gagner un bon million avec sa future formation: “Comment gérer la poussée de cornes sur la tête?”. Elle aura le loisir de pouvoir faire les règles sur son propre site et même publier des jeux avec des #sansdents poursuivant un certain Président de la République. ^^
Il y a à 7’24 à pied de chez moi un libraire qui ne fait pas d’office mais qui fait bien son office en tant que libraire :
http://www.dailymotion.com/video/x62i99_pierre-landry-libraire-a-tulle_webcam
À part ça, j’ai été étonné (même si à la réflexion je ne devrais pas l’être) étonné des choses reprises telles quelles. On procède très facilement ainsi quand il s’agit de rigoler ou de dire du mal ou les deux… Et au contraire, personne n’a relevé que François Hollande serait très doué pour le cunnilingus, toujours “faisant mouche” avec sa langue même épuisé par une journée de travail (page 82).
Tu as bien de la chance, ce monsieur a l’air très sympathique ! C’est drôle, c’est peut-être en lien avec ton commentaire, en allant voir sa vidéo, j’ai eu une publicité pour “Sex Tape” :D
Je crois que le vrai débat n’est pas de savoir s’il faut vendre ou pas le livre de VT, mais la raison.
Ne pas vendre en disant “C’est de la merde donc je ne vends pas” et vendre à côté du Musso, Lévy et autre livre de même qualité… c’est pas très sérieux.
Soit on fait un choix pour tout soit on laisse le client seul juge…
Mon préféré reste celui déniché par Guy Birenbaum : le libraire qui ne vend pas VT par idéologie mais diffuse largement les livres d’extrême-Droite…