C’est une photo travaillée ?
Bonne question, à laquelle il m’est parfois difficile de répondre.
Parce que je travaille en numérique, en RAW, et que j’ai fais justement le choix de travailler toutes mes photos.
Argentique ou numérique, les choix sont les mêmes, pas au même moment
Voici deux photos d’une jarre à Majorelle, à Marrakech. L’une a été faite en numérique, l’autre en argentique.
C’est le même pot, au même moment, seul le cadrage est légèrement différent.
Laquelle semble être la plus poussée, la moins naturelle ?
Celle de gauche ? C’est pourtant celle qui a été faite en argentique, en Velvia, quand j’ai traité la version numérique, je n’ai pas osé poussé au point de la Velvia. Et le scan est fidèle à la saturation de ma diapo préférée.
En argentique on choisit au moment de charger l’appareil
Le choix de la pellicule, que ce soit en noir et blanc ou en couleurs, va déjà déterminer une balance des couleurs, un grain, une latitude d’exposition, une technique aussi d’exposition, pour les lumières ou pour les ombres, selon qu’on a de la diapo ou du film négatif classique. On choisissait du Portra pour des teintes douces, de la Velvia pour des couleurs poussées, de l’Ekta pour des couleurs fidèles. Certaines émulsions tiraient sur le vert, sur le rouge, sur le chaud ou sur le froid.
Certaines d’entre elles supportaient bien d’être poussées, d’autres avaient des sensibilités de princesse au petit pois.
En Raw, on ne choisit pas
Le brut de capteur, comme son nom l’indique, est simplement l’enregistrement des photons qui ont frappé le capteur. En fait on choisit un tout petit peu, en choisissant son appareil, mais après, pour plusieurs milliers d’images, on ne choisit pas.
A la différence du format jpeg, où le programme de l’appareil effectue déjà une sélection des informations, en fonctions de vos choix (fidèle, accentué, coloré, etc…) et de son algorithme, le format raw vous rend la totalité de ce que l’appareil a vu.
On a donc au développement, à la dérawtisation, beaucoup plus de souplesse qu’avec un film argentique.
Souplesse qu’on avait quand même, avec la possibilité de pousser ou pas, et ce pour les films couleurs comme en NB (simplement ça se faisait moins en couleurs parce que les marges d’erreurs sur le temps et la température étaient beaucoup moins larges qu’en NB).
Donc, au moment de ma dérawtisation (au choix, Camera Raw ou LightRoom d’Adobe, Digital Photo Professional de Canon, Nikon Capture, ou autre…), je vais interpréter l’image, lui donner plus ou moins de contraste, modifier la balance des blancs, équilibrer les niveaux, et le faire de façon plus ou moins fidèle à la réalité, faisant le choix que j’aurais fait autrefois entre Velvia et Portra.
Argentique ou numérique, le post-traitement, ou le développement
On passe à une étape plus complexe du travail, mais qui est toujours considérée comme indispensable par les photographes qui font du noir et blanc.
Le métier du tireur, sans lequel le photographe NB n’existerait pas (Eugen Smith, par exemple, tirait lui même, et des mauvaises langues disent que Salgado ne serait rien sans son tireur), c’est de rééquilibrer les ombres et les lumières, de faire “monter” ou “descendre” certaines zones, avec des passages de main, avec des petits bouts de cartons montés sur des baguettes se retrouve sur photoshop, avec les mots magiques densité +, densité – , calques et masques de fusion.
On peut sortir du réalisme, mais au départ, l’objectif était aussi de redonner à la photo l’équilibre lumineux que notre cerveau recrée, nous voyons rarement des zones “blanches”, ou totalement “bouchées”, mais beaucoup plus équilibrées que ce que la pellicule ou le capteur recrée.
En même temps on peut déjà partir dans une démarche beaucoup plus créative, comme Eugen Smith, dont je vous présenterai certains tirages.
Et puis après, il y a la vraie retouche
Celle qui était réservée aux vrais pros, qui demandait des semaines, parfois. Celle où on enlevait des personnages, on en rajoutait d’autres.
Celle qu’on fait si facilement sous photoshop, comme enlever les fils électriques qui dénaturent les paysages marocains.
Cette retouche la transforme la réalité.
C’est celle qui fait des mannequins parfaits, celle qui permet de remettre du soleil et d’enlever les détritus sur une vue touristique, celle qui va permettre de mentir.
Celle que je m’interdis en cas de photo de “reportage”, et qui me parait totalement légitime en dehors de ce contexte.
Alors voilà pourquoi il est difficile de répondre à la question… toute photo est travaillée. Jusqu’à quel point, de quelle façon ? En l’occurrence pour la photo qui l’a suscitée, très peu, juste le petit travail de courbes qui correspond au choix de la pellicule.
Ce qui est flou est donc “d’origine” ?
Tout à fait. Il suffit d’un objectif macro à grande ouverture (2.8 en l’occurrence) pour obtenir cette profondeur de champ réduite.
Salut Marie-Aude
Ceci est un vieux débat entre les traditionalistes de l’argentique et les férus du numérique. Et pourtant ce débat dénote une immense hypocrisie qui était cachée par l’obscurité de la chambre noire. Dans cette chambre ou le labo-photo par la suite, on “travaillait” la densité, le contraste, la saturation, les surfaces bouchées ou cramées,… Les mêmes “travaux”, on peut les effectuer maintenant chez soi avec un logiciel spécialisé genre Photoshop, Paint…
On peut toujours dire que maintenant on transforme une femme “normale” en un mannequin hyper sophistiqué (la pub de Dove pour illustrer) mais je ne crois pas que cela est nouveau: on a toujours retouché (parfois même avec de la vulgaire peinture) les mannequins dans les pubs, on a toujours fait disparaître les poteaux et autres fils électriques dans les paysages américains… Bien évidemment, la déontologie du photographe ne doit pas changer. Elle doit toujours délimiter les genres photographiques: un reportage par exemple n’est pas un essai créatif ou artistique…
A bientôt.
P.S: encore bravo pour tes dernières photos.
Coucou, j’ai besoin d’aide car je comprend plus rien et sur le forum j’y comprend rien du tt, et vu que tu répond souvent aux gens ben j’aimerais bien que tu m’aides, j’aimerai savoir comment t’a fais pour crée ton site internet? car j’aimerais en faire un mais j’y arrive pas, je vois pas comment il faut faire enfin j’ai téléchargé Worldpress mais après je suis perdu ! merci de me répondre, bisou
Bonjour Olivia, le forum est pourtant le meilleur endroit pour poser tes questions.
Je suis sure que tu auras des réponses claires, et si tu expliques ce que tu ne comprends pas, on te détaillera les points qui te sont obscurs.
Comme tu le dis, c’est sur le forum que je réponds. Ici, c’est autre chose, et si on peut parler de points spécifiques liés à WordPress, ce n’est pas une communauté qui fait du support.
Sinon je suis professionnelle, et je fais des sites contre rémunération, mais je ne pense pas que ce soit ce que tu cherches ?
Très intéressant ce point de vue !
Je pense que ces arguments commencent à rentrer dans les moeurs tout doucement ! … j’ai également fait un article sur la retouche il y a quelques temps et personne ne m’a rentré dans le lard !!!! ( )
Je me suis dit que, peut-être, les choses évoluaient quand même … tout du moins chez les photographes !
Ce site m’a l’air bien joli et intéressant ! Je cours de ce pas faire le tour du propriétaire !
Bonne journée !
Je suis arrivé sur ce site via le forum d’ entraide de wordpress et ai un peu parcouru les différents articles.
Je suis entièrement d’ accord lorsque tu signales que le travail de base fait sur un fichier ras, existe depuis toujours, ainsi qu’ une certaine forme de retouche.
Je voudrais juste apporter une constatation faite il y a quelques années. Je suis un fanatique du noir et blanc argentique. Il y a quelques années, j’ ai vu apparaître sur la toile des traitements d’ images complètement délirants, dignes des meilleures “Cokineries” des années 80. C’ était bien souvent le fait de personnes lâchées dans la nature, sans support ni appuis et qui essayaient tout ce qui leur passait par la tête. Certains ont ainsi pu à force de tâtonnement, d’ essais ratés puis réussis, se créer un style. D’ autres ont finis par prendre les chemins de cours du soirs, d’ académies, de workshop, pour apprendre à maîtriser cet outil magique, mais bien plus complexe à maîtriser que le labo classique: sous l’ agrandisseur, avec un bon négatif, j’ ai 4-5 solutions de tirage. Avec un dérawtiseur, sans parler de photoshop, c’ est une infinité de solutions qui s’ offrent à vous, même si le fichier est mal exposé.
C’est tout à fait vrai. Et à chaque nouvelle technique on voit ressortir les mêmes “Cokineries”, comme c’est le cas en ce moment pour le HDR.