Référencement naturel et compétences techniques
Ça me rappelle un dessin de Claire Brétécher, montrant je ne sais plus quel photographe qui disait que son “oeuvre” était créée avant sa matérialisation, et que son appareil photo n’était qu’accessoire. Avec un commentaire de la dessinatrice “oui, et moi maintenant je vais me passer de mon crayon pour faire mes dessins”.
C’est à peu près ce que je pense du nouvel article “anti technique SEO”, sorti cette fois-ci en anglais, “Why Modern SEO Requires Almost No Technical Expertise“, écrit par Jayson DeMers, le patron, justement d’une agence SEO, auquel Rand Fishkin a répondu. Si vous ne lisez pas l’anglais, Xavier Deloffre en a fait un excellent résumé, c’est lui qui m’a fait quasiment renverser ma tasse de café du matin.
(Le blog de Xavier est de toute façon excellent, et, à la lecture du titre, je me suis demandée ce qui lui prenait…)
Bref… tout comme Brétécher ne s’affranchissait pas de la maîtrise du crayon, tant qu’on n’a pas une armée de techniciens à sa disposition, le référencement naturel requiert un ensemble de compétences techniques essentielles.
L’article commence très mal, par une vision négative du “SEO des débuts” :
Because the early days of SEO leaned on backend coding tactics and deceptive tricks to get sites ranking higher, there’s a modern-day misconception that SEO success can only be achieved through a combination of technical proficiency and extensive experience
Parce que les premiers temps du SEO s’appuyaient sur des tactiques de codage dans le back-end et des astuces pour mentir à Google et positionner les sites plus haut, il y a aujourd’hui une conception erronée : le succès en SEO ne peut être atteint qu’à travers une combinaison de connaissances techniques et d’une grande expérience.
A cela je dirais :
- il ne s’agit pas de “SEO des débuts”, mais de la classique opposition entre White Hat et Black Hat, “techniques autorisées” et “trucs pour manipuler”. Elle existe toujours, et les “trucs” sont toujours utiles, même s’ils sont moins nombreux
- je ne connais pas les clients de Jayson DeMers, mais va donc positionner un site sur “serrurier 14°” ou “riad Marrakech” uniquement avec de l’expérience utilisateur et du contenu riche, sans connaissances techniques ni expérience….
Cela continue avec le classique argument “t’as pas besoin d’être technique puisqu’on y comprend rien” (à croire que Jayson a lu Christophe Chaudey).
Google’s search algorithm is completely undisclosed. No search marketer, now or ever (save for a handful of former Google engineers, perhaps), has ever had access to the actual lines of code that determine which businesses rank where
L’algorithme de Google est totalement secret. Aucun spécialiste du Search Marketing (à l’exception peut-être d’anciens ingénieurs de Google) n’a jamais eu accès aux lignes de code qui déterminent le positionnement.
A cela, comme d’habitude, je dis :
- c’est la mauvaise excuse d’un non-technicien
- le reverse-engeneering existe, les tests, les analyses statistiques, qui permettent de savoir avec un degré de probabilité élevé, par exemple, qu’une page qui n’a pas de meta-title ou aucun titre de niveau H1 ou H2 aura plus de mal à se positionner qu’une page bien construite, à contenu égal
- et que les brevets de Google permettent aussi de comprendre un certain nombre de choses.
Ensuite, on rentre dans les choses sérieuses, avec
Offrir une bonne expérience on-site
(Pour la petite histoire, j’ai eu une mauvaise expérience on-site, puisque j’ai voulu commenter et que je n’y suis pas arrivée…)
Une “bonne expérience” est un ensemble de choses qui incluent :
- l’ergonomie au sens large
- la navigation
- la mise en avant de contenus intéressants, présentés de la bonne façon pour inciter à lire
… et qui reposent sur la capacité à tester et analyser (pourquoi telle ou telle page est plus lue, moins lue), aussi bien que sur des compétences en code, pour avoir un site rapide, avec les bons liens aux bons endroits. Qui reposent, aussi, sur la capacité, par exemple, à se passer de Flash, à faire évoluer son site pour qu’il devienne responsive, ou tout simplement, le rendre “accessible”, etc.
Offrir une bonne expérience est une notion très vague. Mais si on l’applique dans un autre contexte, on ne peut pas se sentir confortable dans une maison mal isolée…
Écrire un bon contenu
An English degree might help you write more eloquently, but as long as you’re writing high-quality material that’s relevant for your industry and adds significant value for your readers, you’ll be in good shape.
Cela peut vous aider à mieux écrire si vous avez une licence d’anglais mais, tant que vous écrivez des textes de grande qualité qui sont pertinents pour votre industrie et qui apportent une valeur ajoutée importante à vos lecteurs, vous serez du bon côté.
Désolée, mais “écrire un bon contenu” ne suffit pas. Déjà, la phrase devrait être “écrire un bon contenu pour le web“. Ce qui est totalement différent.
La Comédie Humaine de Balzac est un excellent contenu. Mais absolument pas adapté “au web”. Les feuilletons de Dumas ne passeraient pas non plus.
L’écriture web demande une maîtrise de la pyramide, de la mise en page, du rythme visuel, s’appuie généralement sur des illustrations, des infographies, bref, demande un ensemble de connaissances techniques qui ne s’acquièrent pas en faisant une licence de langue ou de littérature.
(Bien qu’une orthographe correcte fasse partie des nécessités).
Vous faire reconnaître comme une autorité
Pour Jayson DeMers, ce qui est important, c’est d’être reconnu. Il n’y a plus besoin de tactiques pour avoir des liens qui vous permettent cela.
Mouais, comme on dit.
Être reconnu comme une autorité passe par de la visibilité qui passe… par de la technique. Et arriver à gratter en loucedé son lien sur Wikipedia sur le bon article vous donne toujours un grand trafic.
Est-ce qu’acheter un lien sur une page pourrie sur un site en .gov fonctionne toujours ? Non.
Par contre, comme je l’ai fait, racheter un nom de domaine qui avait des liens remarquables, remettre en ligne à la même adresse un contenu pertinent et de qualité, oui, ça aide à promouvoir le site. Et c’est, en quelque sorte, truander Google. Oui j’avoue, j’avoue…
Être populaire sur les réseaux sociaux
Correlation studies have consistently shown that if you have 1,000 highly active followers on Twitter, you’ll rank higher than if you have no Twitter account at all. While correlation doesn’t equal causation, there’s certainly no harm that can come from building your brand in social media channels. (…) Social media marketing is a bit of a science, but the fundamentals are clear and easy to understand
Les études de corrélation ont constamment montré que si vous avez 1.000 followers actifs sur Twitter, vous vous positionnerez mieux que si vous n’avez pas de compte Twitter du tout. Bien que la corrélation ne soit pas une relation de causalité, il n’y a certainement aucun mal à construire sa marque sur les réseaux sociaux (…) Le Marketing Social est un petit peu une science, mais les fondamentaux sont clairs et faciles à comprendre
Heureusement qu’il l’a dit, que la corrélation n’est pas une causalité.
En gros, là on sort totalement du sujet SEO pour entrer dans le sujet trafic.
Et si, sur le fond, je partage son avis sur l’importance des réseaux sociaux, je suis en total désaccord avec le “un petit peu une science”.
On a sur Facebook les mêmes opacités que sur Google. La baisse du reach est une réalité. La capacité à analyser son audience, les meilleurs moments pour poster, les bons formats, les bonnes images, à gérer des campagnes publicitaires qui ne coûtent pas trop cher, au contraire, tout cela est très technique.
Arriver sur Twitter n’est pas simple. Comprendre comment fonctionne cette bruyante volière demande du temps. Je fais souvent la comparaison du petit lycéen de province qui vient de passer son bac et qui arrive dans une grande fac parisienne, complètement paumé…
Être bien noté sur les réseaux locaux
It’s also important to be reviewed well on third-party sites such as Yelp and TripAdvisor, especially if you’re shooting to build your relevance as a local business. But this, too, requires little to no technical expertise.
Claim your profile on as many of these sites as you can (the setup process is relatively simple), then let your customers do the rest of the work for you.
C’est aussi important d’avoir des bons commentaires sur des sites comme Yelp et TripAdvisor, spécialement si vous cherchez à vous positionner comme un business local. Mais ceci non plus ne requiert pas une grande expertise technique.
Réclamez vos profils sur autant de sites que vous le pouvez (le processus est relativement simple), ensuite laissez vos clients faire le travail pour vous.
Si Lumière de Lune n’a aucun intérêt à être sur TripAdvisor, j’ai beaucoup de clients qui, oui, ont intérêt à y être.
Alors, mon cher Jayson, j’ai quelques petites choses à t’apprendre :
- pour le patron moyen d’hôtel ou de restaurant, “réclamer son profil” est un processus long et compliqué
- un client mécontent a dix mille fois de plus tendance à laisser un commentaire qu’un client heureux, donc “laisser les clients faire le taf” est une mauvaise idée. Il faut les inciter à le faire… et si cela ne requiert pas de compétence en codage, cela requiert des compétences marketing (au bon moment, avec la bonne incitation) voire techniques (envoi d’un mail, etc)
Des CMS modernes
L’argument, pour résumer est : les CMS font tout pour vous, c’est super simple à comprendre.
Et c’est là où, pleine de curiosité, je me dis “voyons voir”.
Pour mes lecteurs qui ont la technique de base nécessaire pour apprécier une structure de titres, je vous laisse regarder celle du blog de l’agence de Jayson DeMers :
Pour les autres, ceux qui n’ont pas cette technique, je vous renvoie à mon article sur les quatre optimisations de base à faire dans un site WordPress.
Où à celui sur Buzzea, qui a planté des centaines de blogueuses qui n’avaient pas la technicité nécessaire pour faire la différence entre un lien nofollow et un lien dofollow, sitewide …
Ou, plus récent, à celui sur HelloCoton, qui pose la question du choix entre trafic et optimisation, justement en termes techniques.
Je passe mon temps à aider des gens à comprendre les techniques de base.
Alors, oui, quand on baigne dedans depuis dix ans, on peut “oublier” que c’est de la technique.
Mais non…
On ne peut pas avoir une bonne optimisation pour Google sans technique.
Comme on peut avoir du talent pour la chanson, mais sans travail, sans technique, ce talent passera toujours inaperçu.
Si on a de la chance, on peut bien référencer un site sans être technique. Mais c’est faire le pari que tout se déroulera comme sur des roulettes, ce qui n’arrive quasiment jamais. Je suis pleinement d’accord avec ta conclusion, on ne peut pas se dire bon SEO et ne pas être technique. Outre ce que tu cites, il ne faut pas faire la moindre erreur dans son robots.txt, dans sont .htaccess, gérer ses redirections, gérer sa navigation à facettes si on a un e-commerce, gérer l’architecture de son site, en cas de problème il est bien souvent nécessaire d’aller faire un tour dans le code ou sur le serveur. Enfin bref, si on se cantonne à du webmarketing et de la création de contenu, pour moi on n’entre tout simplement pas dans la définition d’un SEO :)
Pour avoir lu l’article original, j’avoue être satisfait que que qqn réponde à ce Jayson DeMers. Il y a en ce moment une tendance à démonter l’efficacité du seo qui m’agace. Comment prétendre que le référencement naturel ne demande aucune technique, c’est absurde! Il y a des mécanismes à comprendre!
Et puis, faire sans comprendre, c’est comme croire en dieu et attendre qu’il nous félicite.
Vive la science, vive la recherche en SEO, vive les acharnés de la causalité!
En fait, si on sort du “site web pour le plaisir sur une niche absolument non concurrentielle”, son truc, c’est comme de dire “je vais faire une course sans faire attention à mes chaussures”.
Ce n’est peut-être pas l’essentiel, moi, avec les meilleures chaussures du monde, je ne gagnerai jamais un 100m, par contre, même Christine Arron, avec des chaussures de m… qui lui font mal aux pieds, elle est désavantagée face à la concurrence qui sait presque aussi bien courir qu’elle et qui a de bonnes chaussures.
Cette idée qu’il suffit de faire du “bon contenu”, ça m’énerve d’autant plus que, dans 90% des cas, les gens qui n’ont pas de “technicité de base” ne savent pas faire du “bon contenu” et ne savent pas monter un site agréable.
Jayson devrait venir faire un peu de support sur les forums…. il reprendrait pied avec la réalité.
Alors c’est un sujet un peu épineux pour moi parce que je me rapelle m’etre pris le choux copieux avec un codeuyr sur un poste justement qui traitait des capacités techniques des SEO. Dans l’absolu je suis plutot de l’avis de Rand Fishkin dans sa video de réponse a savoir que Jayson Demers zappe quand meme un grand nombre de trucs pour arriver a sa conclusion. je pense qu’il faut trouver un juste milieu.
OUI – un SEO doit savoir au moins lire un code et OUI il doit avoir des capacité techniques juste histoire de pouvoir diagnostiquer certains problemes. Maintenant le SEO n’a pas besoin d’etre un tueur en coding non plus. Il faut jsute trouver le bon mix,
En Post scriptum – les CMS sont effectivement de plus en plus SEO friendly (pour la plupart) mais il faudra que Jayson commence a taffer sur des gros e-commerce ou les CMS sont de toute facon des usines a gaz concues in-house. Il verra que SEO friendly c’est un terme avec un sens bien particulier.
Je suis d’accord avec toi. Le SEO n’a pas besoin d’être un dieu du code… mais il a besoin d’en savoir un minimum, et ce minimum va un peu au-delà de “je mets mon code analytics dans l’option de mon thème” ^^
Surtout quand on s’adresse à des gens qui font “tout tout seuls”, comme cela pouvait être compris dans son article.
Évidemment, quand tu as une grosse boite ou une grosse agence, tu vas avoir des spécialisations. Mais sous-traiter la compétence technique ne veut pas dire qu’elle n’a pas à être là.
En particulier, ce qui m’a énervée c’est le “juste fournir une bonne expérience” qui devrait impliquer la performance… et quand tu est en train d’essayer de rendre ton site plus rapide, ce qui a un impact pour Google, c’est “que de la technique”
Tout à fait juste aussi pour les CMS pas si SEO friendly que ça. Et puis friendly, peut être, après il y a le choix du thème, etc…
Je me tords de rire en voyant l’article écrit par Jayson DeMers. Peut-être qu’il a voulu créer le buzz, je ne sais pas. En tout cas, cela en fait réagir plus d’un. Le SEO moderne ne demande pas de technique ? Faut arrêter là. Les moteurs de recherche sont des robots pas des humains. A partir de là, je vous laisse gamberger. Les cms modernes qui sont déjà optimisés ne le sont jamais entièrement. Il y a toujours une patte technique à ajouter. Certes le contenu joue beaucoup, mais il n’y a pas que ça, loin de là.
Certes, le SEO est un domaine complexe, mais ne pas chercher à comprendre comment ça fonctionne, ça n’est pas très sain comme attitude :-/ D’autant qu’il y a profusion d’articles sur les bonnes articles. En revanche, j’avoue ne pas savoir ce qu’il y a derrière cette histoire de ‘black hat’, que tu avais déjà abordé dans un précédent article. Je vais essayer d’en avoir plus…
A un moment on se dit, tient le SEOsphère s’est arrêté de tourner? Et puis les tintamarres sur la mort du Seo à chaque mise à jour des algorithmes… et maintenant ce sont toutes les technicités du SEO qui sont remises en question? Une longue liste d’expert seo cherchent encore à trouver les meilleures stratégies pour finalement dompter les Bots, ces gens là font quoi alors si les techniques acquises jusque là ne servent à rien?
Créer du contenu SEO et attendre que du monde vienne vous demander en ami dans les réseaux sociaux (et aimer votre page Facebook, si vous en avez) c’est juste une partie de l’Iceberg.
Il est vrai que seuls les ingénieurs de Google ont mis la main sur leurs algos, mais google ne nous cache pas les meilleures pratiques à suivre pour être indexé dans son moteur…
Un site web, c’est un peu notre boutique, nous avons besoin de le faire connaitre pour vendre…