Libéralisation des noms de domaines
En 2009 je créée www.mondomaine.chezmoi
A entendre les journalistes, “n’importe qui pourra avoir son nom de domaine comme il veut”.
En fait, à lire le communiqué de l’ICANN, les choses ne seront pas aussi simples.
Il ne s’agit pas non plus de créer de nouveaux noms de domaines (comme lumieredelune.com) mais des extensions, comme le .com
Donc l’ICANN, aujourd’hui seul autorisé à créer des extensions, ou “top level domain” (tld) a décidé de laisser d’autres entités participer, moyennant bien entendu finances.
La création d’un tld c’est beaucoup de travail, et une grosse responsabilité. Une fois le tld créé, derrière, viennent les registrars, qui permettent de créer des noms de domaine, selon des règles qui varient en fonction du tld.
Il y a aujourd’hui de nombreux “Top Level Domain”, en gros un par pays (les .fr, .ca, .ma , .cn) et des plus génériques qui sont accessibles à tout le monde (.info, .net, .com, .biz) ou plus restreints comme les .edu, .gov ou des extensions moins fréquentes, les .tv ou les .travel
En ouvrant à d’autres la possibilité de créer des tld, l’ICANN multiplie les possibilités de créations de noms de domaines (puisqu’on va pouvoir, à nouveau, déposer des noms de domaines déjà enregistrés dans tous les tld intéressants aujourd’hui), et s’assure de substantiels revenus.
Voici déjà le schéma de la procédure à suivre pour l’attribution d’un nouveau tld, sur le site de l’ICANN.
Pas simple n’est-ce pas ?
Normal.
Dans ce document, on voit que le principal souci de l’ICANN, en ouvrant la porte, est de garantir la stabilité du système d’adressage, ou DNS, qui vous permet, quand vous tapez lumieredelune.com d’arriver sur cette page. Jusqu’à maintenant gardienne unique de la racine, donc les tld, l’ICANN n’entend pas laisser les nouveaux venus mettre le désordre, ce qui entend une procédure d’acceptation basée sur trois éléments :
- la stabilité financière (pas question d’autoriser un tld pour une société qui risque de mettre la clé sous la porte le lendemain)
- la compétence technique (et si vous ne comprenez pas le document de l’ICANN, c’est que vous ne l’avez pas)
- la pertinence du nouveau tld : pas d’atteinte au droit des marques, pas de confusion possible avec les tld déjà existants
Donc pourrez-vous, en 2009, déposer le ndd www.jean.dupond ?
Uniquement si le tld .dupond existe.
Ou alors si vous pouvez passer à travers la procédure de l’ICANN, et faire créer ce tld.
Peu probable.
Directement, donc, rien ne va changer pour vous et moi.
Ceux qui vont créer des tld seront sans doute des grosses sociétés intervenant sur internet.
On peut imaginer, par exemple, que les gros registrar (les sociétés qui vendent les noms de domaine) ou les gros hébergeurs, fassent ouvrir un tld et le proposent ensuite à leur client.
Comme on a une adresse mail @yahoo.com, on pourrait avoir mondomaine.yahoo, ou mondomaine.gandi
Des organisations professionnelles, des grosses sociétés pourraient le faire aussi.
Mais en pratique, pour monsieur tout le monde, vous et moi, à part élargir les possibilités, cela changera peu de choses.
Et le cybersquatting ?
Le cybersquatting est une des plaies d’internet. C’est le fait de voir son nom de domaine déposé sur une autre extension, ou alors avec juste une faute de frappe. Et ensuite, le squatteur essaie d’en tirer bénéfice.
Un de mes clients, un hôtel à Zagora, le Palais Asmaa, en souffre, puisque le site qui sort deuxième sur le nom de domaine est un cybersquat renvoyant sur une page en parking.
D’une certaine façon, les risques de cybersquatting vont augmenter, puisque les noms de domaine ouverts seront plus nombreux.
En même temps, les tld les plus libres aujourd’hui, sont soit les génériques gérés par l’ICANN, soit ceux de certains pays peu regardant. En revanche, les tld spécifiques, comme les .gov, les .edu, les .travel ou autres, ont des règles d’attribution plutôt plus strictes.
La stabilité recherchée par l’ICANN, comme son souci de protéger le droit des marques et d’éviter les ambiguïtés laisse penser que la politique d’attribution des noms au sein des nouveaux tld sera un des critères d’attribution.
Verra-t-on des tld de type .france ou .swiss ? Sans doute pas. Le risque réel de création de noms de domaine ambigus, comme gouvernement.france laisse croire que ces tld seront soit purement et simplement refusés, ou laissés aux pays administrant déjà les tld classiques (comme le .fr) et à ce moment là soumis aux mêmes règles.
Par ailleurs, le grand public, aujourd’hui connait le .com, et l’extension de son pays. Tout le reste est assez anecdotique. L’inconvénient, réel, du risque de cybersquatting, sera largement compensé par l’augmentation du nombre de noms de domaines disponibles.
Edit : le tld sera à 100.000 usd apparemment. On est très loin du domaine à 10 euros pour le site perso.
Merci pour cet article, qui clarifie un peu la confusion des annonces d’hier.
De même, merci grandement pour ces explications… j’avoue avoir éprouvé quelque étonnement en apprenant les (fausses) nouvelles hier ;)
D’ailleurs Jean-Marie Le Ray a piqué un coup de gueule mérité sur ces approximations journalistiques, ici :
http://adscriptum.blogspot.fr/2008/06/correctif-licann-et-le-lancement-de.html
C’est le premier papier réellement fouillé que je lis sur le sujet. Merci, Marie Aude !
Note tout de même que je te fais un procès si tu crées un .chezmoi :-)
Bon, bon, bon…. je m’abstiens alors :)